Et si Faure meurt, ce soir à 20h?
In limine litis, je désire mettre certaines choses au clair : Je n’ai absolument rien contre le Président de la République Togolaise, je n’ai jamais souhaité et je ne souhaite pas sa mort (quoiqu’il ne soit pas immortel. D’ailleurs, il était mort et ressuscité non ?). Je n’envisage absolument rien pour attenter à sa vie, je n’en ai ni le temps, ni l’envie, encore moins les moyens. Je le répète : Je n’ai absolument rien contre le Président de la République. Je le dis, car on se connait dans ce pays…
Ceci dit, entrons dans le vif du sujet.
En février 2005, je pilais tranquillement du foufou, lorsqu’une tante nous rend visite, puis nous annonce officieusement la mort d’Eyadema. Même en regardant le gars venu à la TVT faire l’annonce officielle au journal télévisé, je n’y ai pas cru. Eh oui ! Même le jour des funérailles, en regardant le pauvre Premier Ministre d’alors, pleurnicher comme un môme à qui on a retiré une sucette devant le cercueil, je n’y croyais toujours pas…
Alors, chers togolais, imaginez un seul instant ceci : après une rude journée de bons et loyaux services, coincé dans un bouchon, quelque part en ville, ou à votre retour à la maison, affalés dans votre canapé au salon, vous apprenez la mort du Chef de l’état togolais. Oui oui, je vous invite à ce grand exercice, je vous convie, l’instant de la lecture de cet article, à « porter atteinte à la sûreté de l’état ». Oui, togolais, imaginez cela quelques instants seulement. Qu’importe celui qui vient faire l’annonce à la télé ou à la radio, imaginez juste qu’on vous dise qu’il est mort, et cette fois pour de vrai !
Pouvons-nous continuer l’exercice ?
Si oui, à ce niveau des développement, j’aimerais qu’on se pose quelques petites questions, dont la toute première est : Que se passera-t-il ensuite ?
- Les frontières du pays seront-elles fermées ?
- Les communications seront-elles coupées ?
- Le Ministre de l’intérieur présentera-t-il sa démission à la suite de révélations apocalyptiques ?
- L’armée nous présentera-t-elle un nouvel héritier ?
- Un Gnassimgbé de plus fera-t-il son apparition au sommet de l’état ?
- La population se soulèvera-t-elle ? Si oui, sera-t-elle matée ?
- Combien de morts y aura-t-il ? Y aura-t-il des déplacés ?
- Certains togolais deviendront-ils réfugiés, ou exilés ?
- Y aura-t-il organisation d’élections ad hoc, pour légitimer le nouvel héritier ?
- La population finira-t-elle par se résigner, et par laisser l’héritier gouverner ?
- Va-t-on une fois de plus prendre les mêmes pour recommencer ?
Arrêtons-là pour le moment.
Le scénario le plus réfléchi, le plus recommandé d’ailleurs, est que la Présidence de la République soit occupée par le Président de l’Assemblée Nationale, en l’espèce Abass Bonfoh ; (le pauvre, une fois de plus, il sera Président par accident). Celui-ci aura la tâche d’organiser en 60 jours (Article 65 Alinéa 3 de la Constitution Togolaise), de nouvelles élections pour désigner un nouveau président de la République.
En fait, où voulais-je en venir ?
La mort de Faure Gnassimgbé, si elle nous était annoncée ce soir à 20h, prendra de court toute la classe politique, parti au pouvoir, comme partis de l’opposition. Elle aura le mérite de mettre à découvert l’impréparation de nos hommes politiques à la magistrature suprême. Qu’on se dise la vérité : il n’y a absolument personne actuellement, capable de prendre les rennes de ce pays, à l’instant où j’écris cet article ! Personne ! Je ne prétends nullement qu’ils sont moins méritants, ni que Faure est le meilleur Président de tous les temps, non ; juste qu’aucun d’entre eux n’acceptera devenir président ce soir, même si la Présidence lui était offerte.
Actuellement, l’opposition togolaise est bicéphale : Coalition et Collectif. J’ignore tout des conflits d’interêts au sein de chacun de ces regroupements, mais aucun des hommes à leur tête n’a le profil de Président de la République.
A supposer, oui à supposer que le Collectif décide de laisser Monsieur Fabre être le Président. Les mots qui vont suivre n’engagent que moi : Voilà un homme qui a été candidat par accident (à cause de la maladie de Gilchrist) aux dernières élections présidentielles, et qui profite de sa vague de popularité et de la disgrâce de son ex-patron pour créer un parti politique. Cet homme, dont j’ignore tout (je suis franc), a eu pour première stratégie politique, les marches de protestations : on a beau détester Faure mais on ne marche pas le ventre creux, et le peuple qui le suivait avait faim. Je ne sais par quelle alchimie, il se ligue avec des Associations de défenses des Droits de l’homme, et la Société Civile. Ce qui est grave pour une démocratie ! (Je m’expliquerai plus bas).
A supposer, que la Coalition laisse au CAR le soin de présenter un candidat. Si ce n’est Apévon, ce serait sûrement Kissi. Ces messieurs sont de respectables personnes. Mes hommages, au passage ! Mais dans les circonstances actuelles, que peuvent-ils faire concrètement ? Que peuvent-ils faire, en tant que Président de la République ? Quels dossiers politique, économique ou social maîtrisent-ils ? Par combien de togolais sont-ils connus ? Peuvent-ils prendre en main le destin du pays, et le propulser définitivement, sans qu’il n’y ait rupture ?
Faure est-il la personnification du Mal togolais?
Je le répète encore, mes propos n’engagent que moi. Voilà en gros, une opposition peu organisée, sans emprise aucune sur aucun pan de l’économie nationale, sans influence aucun sur l’intellect de la nation (oui, les idéaux politiques peuvent passer subrepticement dans les discours des professeurs d’universités ou écoles), sans véritable représentation sur l’étendue du territoire, mais aussi et surtout, sans véritables programmes politiques. Voilà des partis, dont le seul but, est le départ immédiat et sans conditions de Faure Gnassimgbé. Avant Faure, le Togo était mal en point ; avec lui, le Togo est pire ; mais avec vous, il sera comment ?
Personnellement, je n’ai aucune admiration pour Faure, mais je ne suis pas non plus convaincu par ces hommes politiques, qui font feu de tous bois, quitte à surfer sur la vague des revendications du Syndicat des Travailleurs. Le danger pour ce genre d’alliance en démocratie, si un jour ces messieurs accèdent à la magistrature, c’est qu’il n’y a plus véritable séparation des pouvoirs, et il y aura trop de personnes à remercier…
Pour conclure…
Moi, Aphtal, je n’aimerai pas que Faure s’éternise au pouvoir, et je n’ai même pas envie de le voir briguer un autre mandat. Mais j’aimerai pouvoir voter pour des hommes capables de me séduire, de me convaincre, capable de faire mieux. Je désire au plus profond de mon frêle être qu’il y ait alternance au Togo ; pas d’un Gnassimgbé à l’autre, pas du mal au pis.
Si ce soir, Faure meurt à 20h, qui sera capable d’écrire une nouvelle page de notre histoire ? Que le Peuple, seul détenteur de la Souveraineté Nationale, prenne son destin en main. Suivez mon regard…
J’ai dit !
Commentaires