A qui sont ces cuisses à peine voilées…
De gros nuages blancs, purs et soyeux s’écartent peu à peu, pour m’offrir à travers le hublot, un spectacle d’une beauté séduisante, captivante. Nue et mouillée par une fine et insistante pluie, elle avait l’air fraîche et proprette, et la magnifique verdure, plus ou moins dense qui s’étendait à perte de vue, comparables à de poils pubiens, finissait de lui donner des allures de vierge qui enfin décide de se livrer à son homme.
J’avais l’impression de pénétrer en véritable maître des lieux, cette chaude fille, pardon, cette chaude ville, lorsqu’en atterrissant, une voix essoufflée, annonçait à bord « 30 degrés, température au sol ». Ouagadougou, me voici !
Soit dit en passant, j’étais à Ouagadougou dans le cadre de la 4e session des universités d’été des droits humains, organisée par le CIFDHA, en étroite collaboration avec le CODAP. Nous étions 4 Togolais, sur 28 participants, venus d’un peu partout de l’Afrique. Ok ok.
Une fois mes bagages posés, et la prise de contact effectuée, un organisateur, qui n’est autre que le blogueur camerounais Nelson Simo, décide de me « souhaiter la bienvenue », en m’offrant une balade nocturne à travers les rues de la capitale du pays des Kaboré ; une ballade à moto, s’il vous plaît. On a tôt fait de quitter l’Institut international qui nous abritait, de nous éloigner de la zone de l’université de Ouagadougou, passer rapidement devant la Primature, pour nous diriger vers le centre de la ville, à la recherche d’une de ses plus célèbres avenues. Eh oui, un Togolais, et un Camerounais, déambulant à moto en plein Ouaga, à la recherche d’une avenue ghanéenne : Kwame N’krumah.
Le délicieux vent qui fouettait mon curieux visage ne m’empêchait guère de reluquer l’arrière-train de ces charmantes demoiselles qui, malgré l’heure avancée, faisaient partie du décor. Des lianes, il y en avait de tous les types : fines, courtes, élancées, maigrichonnes, bien en chair, trapues, costaudes, grosses, noires, café au lait, chocolat, claire, clair-clair, rouge-clair, rouge-tomate, rouge-ketchup. Oh Seigneur, il y en avait de toutes sortes.
Un aller, puis un retour ! Mais le petit diable qui logeait en moi n’était point satisfait. Il lui fallait s’en approcher, en toucher, en admirer de plus près, échanger, et tout ce qui va avec. Mon ami et guide pour la circonstance, ne se fait pas prier pour garer la moto, dans une ruelle crasseuse, mal éclairée, quelque part pas loin du mythique bar « Taxi-brousse ».
Par pudeur, je me tais, et laisse la plume à mon aîné Nelson, pour qu’il raconte cette partie de notre périple.
Je te comprends cher frère jumeau, les éperviers volent haut et ne se retrouvent dans les bas étages que pour taquiner les lions et avoir leur ration. A la fin du récit, on verra qui de nous est le moins pudique…Bref…
Il était sensiblement 22 h 37 lorsque nous nous apprêtions à achever notre tour sur la KK*. L’excitation de mon passager était palpable. Le Togolais à bord de mon engin à deux roues ne semble pas ébloui par les édifices et hôtels quatre étoiles qui jonchent l’avenue. Il pousse quelques frémissements, mais ce n’est pas dû au spectacle offert par l’alignement de la dizaine des maquis et des restaurants aux terrasses chics équipés de wifi. D’ailleurs, il ne fait aucun commentaire ni aucune approbation quand je lui indique verbalement ces lieux.
Ce n’est même pas cette brise glaciale assez particulière qui entraîne une poussée hormonale chez mon voisin de derrière. A chaque vue d’une grue en tenue de travail, postée comme un poteau électrique, je le sens tressaillir et entends ces mots résonner silencieusement du fond de son cœur « Il faut que je touche du doigt ces réalités ouagalaises ». Je décidai de faire plaisir à mon « hôte ». Une sorte de baptême, pareil à celui que je reçus dans ces mêmes espaces quatre ans plutôt. A cette époque, le célébrant de ce rituel qui me consacra était nigérien (du Niger inh pas du Nigeria !)
A la lisière de la K.K., nous aperçûmes un bataillon de la «brigade mobile des plaisirs charnels». Une demi-dizaine de catins toutes postées sur leur moto comme des monteuses d’étalons. Les fringues qu’elles arboraient ainsi que leur position cavalière laissaient transparaître une partie du chemin gazonneux de leur corps qui mène au lieu sûr de la lascivité. Les cuisses et toutes ces parties qui font lécher les babines à tout homme normal étaient à la portée de nos regards les plus sensibles. Je sentis l’excitation de l’habitant de Cacaveli décupler. Je décide de garer.
A peine avions-nous coupé le moteur de l’engin qu’une de ces tapineuses, la trentaine environ, la plus âgée visiblement, d’un teint clair fabriqué à coups de produits (car trahie par la noirceur de ses doigts) s’approcha et nous apostropha en ces termes tout secs : « On va où ? ». L’épervier togolais ne se fit pas prier pour expliquer à la gentille demoiselle que nous sommes nouveaux dans la ville. Comme si elle attendait cette réponse, elle répliqua :
– « Il y a une auberge au fond de cette rue avec des chambres propres, l’heure c’est deux mille francs Cfa. On peut y aller.»
Aphtal, stupéfait sans doute par le pragmatisme de la gagneuse, me laissa poursuivre la conversation
– « Et toi-même, tu prends combien ? »
– « Quinze mille, la chambre y compris » me rétorqua-t-elle.
Surpris par sa valeur libidinale en comparaison aux péripatéticiennes de Douala ou d’Abidjan qui marchandent à partir de trois fois moins que cela, je lui fis savoir que mon hôte et moi n’avions que 1 500 F Cfa, lieux du crime charnel y compris tout en précisant que nous n’étions qu’intéressés par les plaisirs buccaux.
Il n’en fallut pas plus pour qu’elle poussât un kilométrique « Tchrrrrrrrrr » et prit congé sans nous toiser.
Je me tournai, regardai mon voisin : éclats de rire coordonnés, et on démarra en trombe pour achever cette partie de plaisir qui venait de commencer.
La première mi-temps de cette partie d’allégresse panafricaine venait de s’achever. Le lion camerounais et l’épervier togolais se sont fait dompter par un étalon burkinabè sur une avenue ghanéenne. L’avenue Kwamé N’Krumah portait si bien nom. Le Père du panafricanisme pouvait en être fier.
La deuxième partie de ce match nocturne allait se jouer dans l’antre nigérian à Ouagadougou. Dapoya ! Cette mi-temps à elle seule mérite qu’on lui consacre un billet.
Rendez-vous très prochainement pour la suite de l’aventure.
Prochain article, sous peu, chers lecteurs…
*Avenue KK. : Abréviation locale de l’avenue Kwame N’Krumah
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