Etudes supérieures: Faculté De Droit en danger

C’est dans un souci de diversification de la formation, et d’embellissement de mon curriculum vitae, que je m’échine à vouloir obtenir, vaille que vaille, ma Licence en Profession Judiciaires à l’Université de Lomé. (J’en ai déjà une en Affaires et fiscalité) ! Dieu seul sait comment j’ai réussi à franchir les caps de la première et de la deuxième année. A Lomé, la FDD n’est pas la Faculté De Droit, mais plutôt la Faculté De la Désorientation. Suivez mon regard.
La semaine dernière, c’étaient les examens semestriels à la Fac de Droit. Paresseux, je ne compose que dans trois petites matières ! Sauf qu’à Lomé, il n’y a pas de petite matière. Fondamentale comme transversale, toutes les unités d’enseignement se valent. L’une de ces « petites matières » est le Droit du Travail, que j’ai déjà raté l’an passé. C’est donc en cartouchard que je quitte ma demeure, le crâne plein de lois sociales jamais appliquées, pour tenter une fois de plus ma chance ! Oui c’est une affaire de chance, vous aussi. Et je n’étais pas seul hein. Nous étions…. Je n’ai pas compté mais, vous allez m’y aider, adorables lecteurs.
Censée se dérouler dans l’Amphi 1000 (mille places donc), l’épreuve de Droit du travail ne pouvait démarrer à l’heure prévue, car, il y avait plus de candidats que de places assises. Heureusement, l’Amphi 1.500 n’étant pas loin, nous, le trop plein, avons donc été redirigé vers celui-ci. Vous savez, pour suivre les cours ou pour composer, seuls les nouveaux étudiants sont enthousiastes ; ils veulent les meilleures places assises, à croire que les notes dépendent de la proximité de l’étudiant à la chaire de l’enseignant. Nous autres cartouchards, (on se reconnait toujours par notre habillement et notre air désintéressé, et nonchalant), avions une démarche royale, traînants les pas à l’arrière de la foule. Le temps d’arriver à l’entrée, l’amphithéâtre était déjà plein. L’un des surveillants nous empêchait même d’avoir accès à la salle, car celle-ci ne respectait pas les normes d’évaluation, tellement elle était bondée.
Après une dizaine de minutes d’âpres négociation, ils consentent à nous rediriger vers une petite salle réservée pour les travaux dirigés. Là encore, la salle était pleine à craquer, mais on ne pouvait plus faire autrement. A la guerre comme à la guerre. On réussit à s’entasser dans la salle, attendant les cahiers d’examens et les épreuves. Tic-tac ! Tic-tac ! Tic-tac ! Tic-tac ! Cinq, dix, quinze, vingt, trente minutes, et aucun surveillant ne vient nous voir. Pas de cahiers, pas d’épreuves. Panique. Un camarade et moi sortons alerter les surveillants de l’Amphi 1.500 !
« Oh c’est pas vrai ! Ok Attendez, je vais contacter le décanat ! S’il reste des épreuves, on vous les apporte. Retournez vous asseoir, vous aurez les rabats tout de suite ».
Foutaises ! Ils nous avaient oubliés. Ils finissent par apporter des cahiers d’examens, mais largement insuffisants pour nous ! Les épreuves, elles, arrivent quelques minutes plus tard. C’est là tout est gâté. On se retrouve avec des étudiants ayant des cahiers d’examens, mais sans épreuves ; d’autres avaient les épreuves, sans les cahiers d’examen ; un autre groupe n’avait ni l’épreuve, ni le cahier ; un petit groupe d’élus, avaient le cahier, et l’épreuve. Moi, je n’avais que l’épreuve ! Nous avons supplié, qu’on nous trouve des cahiers, en vain. D’ailleurs, il m’aurait servi à quoi, ce cahier d’examen ? J’avoue avoir parcouru de long en large l’épreuve, sans vraiment savoir ce que ce vieil enseignant (respectable et compétent, pourtant) attendait de moi. Des mini-cas pratiques, avec un minimum de lignes de rédaction à atteindre impérativement ; des questions avec de dangereux clairs-obscurs !
Comme si tout cela ne suffisait point, les rares étudiants qui ont à la fois l’épreuve, le cahier d’examen, et quelques réponses à proposer à l’appréciation souveraine du professeur, n’avaient que 35 minutes pour le faire ! Pourquoi ?
Bah, on s’en fout de l’heure du début, celle de la fin est certaine : On fini tous en même temps, que ce soit en Amphi 1000, 1.500, ou dans la salle 50 de TD. Vous finissez tous à la même heure, c’est-à dire 16h30. Voilà ! Ce qui est dit est dit !
FDD, Faculté Du Désordre.
De toutes les façons, je n’avais rien à griffonner alors je plie l’épreuve, la plonge dans mon sac, puis quitte la salle ; comme beaucoup d’ailleurs. C’est cela, les études juridiques à l’Université de Lomé.
Comme moi, beaucoup de ceux qui reprennent le droit du travail, l’ont déjà raté. Pourquoi ? Je ne sais pas vraiment ! Mais je sais que mon ardeur à la tâche a considérablement baissé depuis que le désordre s’est installé à la fac ! Un cafouillage total, depuis l’avènement de ce système LMD. Les profs n’y comprennent que dalle, les étudiants encore moins. Voilà. La première fois que j’ai composé en Droit du Travail en 2010, nous n’étions que 300 étudiants inscrits en cette matière, dont à peine 80 étaient cartouchards ; à force de faire redoubler les étudiants, nous étions plus de « 1.000+1.500+50 surpeuplés » étudiants à composer, la semaine passée.
Je sais que si je devais faire un devoir, avant de passer l’examen en cette matière, je l’aurai certainement validé depuis ; surtout si j’ai une chance d’aller aux sessions de rattrapages ! Hélas, à la FDD de Lomé, la pratique qui s’est installée est celle de la « Sudden death », ou Mort Subite. C’est un système qui consiste à faire composer l’étudiant une seule fois l’an ! Pas de devoir, pas de rattrapages ! Un coup KO ; tu rates, tu reprends l’année prochaine ! Oui, c’est cela, notre faculté.
Je ne vais point parler aux noms de tous les étudiants en droit, mais en ce qui me concerne, je me sens incapable de me réveiller à 4h du matin pour me rendre à la fac, pour suivre un cours qui ne débute qu’à 7h, juste pour trouver une place assise ! Moi Aphtal, je ne pourrai plus passer toute ma journée sur le campus de Lomé, parce que j’ai cours de 7h à 19h, même entrecoupée de longues pauses. Moi Aphtal, je ne pourrai plus passer mes nuits à lire un cours de 200 pages (format Word, Times New Roman, Taille 11), en sachant que le Prof ne m’interrogera que sur un seul paragraphe du cours. Je suis incapable d’errer d’amphi en amphi, pour composer dans une matière que je suis sûr de rater.
Je ne suis rien ! Je ne suis ni pédant, ni auto-suffisant ; je ne suis pas non plus défaitiste, ou incapable de faire des études de droit ! Je ne suis qu’un simple citoyen qui aspire à étudier dans la dignité ! Est-ce trop demander ?
J’ai dit!
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