L’alcool, l’islam et moi…

Bien le bonjour à vous, chers lecteurs. Je vous espère en pleine forme. Moi, pas vraiment ; je sens que je vais devenir SDF ! Sérieux, depuis que mon père me menace de me jeter de la maison, je crois que je viens de lui donner une valable raison pour le faire.
Les griefs qu’il a contre moi sont légion. Mais le principal sujet sur lequel lui et moi ne sommes jamais d’accord, et celui de la religion. Oui le linge sale se lave en famille, mais là je risque ma chambre à coucher, alors…
Plantons le décor !
Le week-end dernier, j’étais invité à un banquet dans un somptueux hôtel de Lomé. C’était tout sauf vos déjeuners habituels, là hein. Je finis de me servir, je retourne chercher une bouteille de boisson (sans trop faire attention, à cause de l’habitude), puis je m’installe. A peine avais-je entamé mon plat qu’un homme plutôt âgé vient occuper la chaise à côté de moi. Ayant reconnu mon grand-oncle, je me lève prestement (en bon Kotocoli), pour lui faire les révérences et l’aider à s’installer. J’ai même failli tremper le bout de ma cravate dans ma sauce tomate.
Nous échangeons les salutations, prenons les nouvelles de toute la famille (même celles des aïeuls décédés), puis chacun reprend ses couverts. L’oncle remarque, entre deux causeries, qu’au-delà de l’odeur du poisson que je dégage, il y avait une autre odeur, plus forte, ressemblant à celle de liqueurs interdites. Il remarque alors la petite bouteille de bière posée devant moi, et mon verre à boire déjà vide (enfin, il y restait de la mousse au fond).
– Tu bois quoi là, fils ?
– Euuuuh….
– Safroulaye !
Erreur N°1 : le vieux tonton s’est mis à me sermonner, à me faire la morale en haussant le ton, là à table, aux yeux de tous les autres convives.
Erreur N°2 : il s’est même permis de me demander si c’était à cause de la jolie fille à côté de moi que je buvais de la bière. (Une fille qui est déjà dans cet endroit, c’est avec bière petit modèle je vais l’impressionner ??)
Erreur N°3 : mon vieil oncle sort sont Smartphone qu’il pose sur la table, entre nous. Déverrouillage >>> Contacts >>> Docteur CISSE C. (c’est-à-dire mon père) >>> Lancer Appel >>> Valider. Dès que mon vieux décroche, ils se saluent longuement et se mettent même à réciter des sourates au téléphone. J’ai compris que l’oncle allait verser dans la délation.
« hehe, Docteur, Gnana gn’adi ? Alhamdou lilaye ca va, mon frère ! (…) Oui ça va ! (…) je suis actuellement avec un de tes fils (…) non Aphtal. (…) Oui il est à côté ; et d’ailleurs je ne suis pas content de lui. Pas du tout. Figure-toi que… (bla bla bla bière bla bla bla alcool bla bla bla haraam bla bla bla péché bla bla bla voyou bla bla bla…) »
Fatal Error : il se tourne vers moi et me dit que mon papa veut me parler. Au lieu de me passer le téléphone, il le met sur haut- parleur et le pose sur la table…
Le téléphone grésille et j’entends mon père qui commence déjà avec toute la verve et toute la cinglante éloquence qui lui est propre.
« – allo ? Aphtal ?
– Salam aleykoum papa. Comment tu vas ?
– Cesse de faire semblant. Tu n’es même pas fichu de…
– Papa, je suis à table et je ne peux pas parler tout de suite. On remet la discussion ?
– Non écoute moi, il faut que tu saches que…
– Allez docteur, je sais que tu n’as pas effacé mon numéro. Rappelle plus tard pour me dire ce que tu as à me dire. Porte-toi bien, père »
J’ai raccroché puis j’ai remis le téléphone à son propriétaire. Il faisait l’étonné et voulait hausser le ton. Je me suis levé, je lui ai dit « #&°*°*°°)=+}/#&&~<-_-}}%* », je lui ai souhaité bon appétit et j’ai changé de table.
Expliquons-nous !
N’allez pas croire que je suis irrévérencieux, envers mon père. Cependant, l’un des domaines dans lesquels je réclame totale indépendance est celle de la religion. La religion et la religiosité. Et Dieu sait que très souvent je n’ai de problèmes qu’avec une catégorie de musulmans, les « musulmans abrutis » (à ne pas confondre avec musulmans convaincus, ou musulmans modérés, ou musulmans endurcis); ou plutôt ceux qui croient connaître et pratiquer l’islam.
Je n’ai pas la prétention de parler au nom d’une religion que je ne maîtrise pas. Mais vous qui prétendez en être les chantres, quelles leçons êtes-vous capables de donner ? Quels conseils êtes-vous prêts à risquer à mon égard ?
Je ne suis pas parfait. Mais qui l’est ? Qui d’entre vous l’est ? Oui il m’arrive de boire de temps à autre une petite bouteille de bière. Mais je suis convaincu que cela ne fait pas de moi le pis mécréant ou le plus grand transgresseur que votre religion n’a jamais connu.
Qu’est-ce qui gêne le plus en fait ? Le fait d’assumer son « péché », ou celui de faire l’ivrogne en cachette ? Je n’essaie pas de justifier mon goût, ni d’alléger ma conscience en comparant/classant les péchés. Mais sérieux, entre boire une bière (une seule petite bière) en public, et se cacher pour avaler des décilitres de scotch, que préférez-vous ?
J’ai lu dans un Livre saint (lisez un peu, il n’y pas que le Coran qui le soit), que ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme… je préfère boire tranquillement une bière, que de faire de 4 bonnes femmes, de malheureuses épouses rongées par le manque d’amour, d’attention et de matériel. Vous pensez qu’on ne lit pas la peine de vos épouses ? Vous pensez qu’on ne devine pas la souffrance de vos enfants ? Vous pensez qu’on ne vous voit pas faire le paon à table alors que vous n’avez rien donné pour la popote ?
Je préfère boire une bière dans un bar à Cacaveli et siffler les filles qui passent que de me priver d’admirer ces belles créatures divines, en nourrissant secrètement le vœu d’en prendre une en levrette. Vous croyez que la bosse qui se forme entre vos jambes à chaque fois qu’une fille passe est cachée par la blancheur de votre boubou ? Vous croyez que nous ne lisons pas les SMS que vous envoyez à nos amies, à nos copines, à nos convoitées ? Les transferts d’unités que vous leur faites, les appels nocturnes et les confessions que vous leur faites, cela est-il plus décent que notre présence dans un bar ?
Je préfère éviter le tapis de prière, que le souiller avec mes pieds qui s’empressent au mal, une fois l’avoir quitté ; je préfère m’habiller en jean, ou en costume, que de passer ma vie enturbanné, comme si le boubou était un pilier de l’islam (Faites le distinguo entre la culture et la religion) ; je préfère être solide dans ma foi, m’atteler à plaire à mon Dieu, que de vouloir vaille que vaille convaincre mon prochain que sa religion est la pire.
Beaucoup de « musulmans » aiment à paraître. Moi je sais que la fille en burka n’est pas forcément plus vertueuse que celle qui ne porte pas de foulard ; la femme en voile intégral n’est pas plus fidèle à son mari que celle qui est en veste ; celui qui connaît le Coran par cœur n’est pas plus méritant que celui qui ne connaît que 5 sourates.
Je ne parle pas de mon oncle, ni de mon père, ni de mes cousins… Je parle de tous ces hypocrites qui croient prouver quelque chose en criant « safroulaye » à tout coin de rue.
Des abrutis, il y en a dans toutes les religions. Et toutes les religions ont déjà eu des prophètes. Dieu n’a vraiment pas besoin de défenseurs, pour prouver qu’il est l’alpha et l’oméga…
Je disais à un ami malien récemment que la religion est un sujet délicat qu’il faut se garder d’aborder…avec les cancres. J’ose croire que des cancres, il n’y en pas parmi mes lecteurs… Mais bon, sait-on jamais.
Je suis convaincu que le véritable culte est intérieur, et que toute religion qui tente de diviser les hommes, vient du diable. Maintenant, libre à vous de recréer Dieu à votre image.
J’ai dit !
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