Que la Loi soit dignement représentée…

Fiat lux !
J’éprouvais de la paresse à rédiger ce billet, mais là je suis décidé à le publier. La motivation ? Eh bien cet après midi, en me rendant à la célébration de la Journée Mondiale de la Poésie, un policier nous a renversé, parce que mon conducteur n’avait pas de plaque d’immatriculation sur sa moto. Je n’ai pas réagi ! Je suis juste parti, maugréant en moi-même. Là, en y repensant, je bous intérieurement, et je décide de terminer ce billet que j’ai commencé. Comme quoi, cela n’arrive qu’aux autres ; on ne réalise pas tant que ça ne nous touche pas…
Mardi dernier, je devais me rendre à la banque pour affaires me concernant. Il a fait plutôt beau : un ciel dégagé, un soleil plus ou moins clément, un vent paresseux, et une poussière omniprésente. Mon itinéraire était bien défini : Cacaveli-Deckon. Et sur ce tronçon, se trouve la magnifique ambassade des États-Unis d’Amérique. (Elle est si belle, qu’elle doit être la plus belle ambassade USA au monde. Suivez mon regard).
J’étais donc sur mon zémidjan, en direction de la banque, lorsqu’arrivés au niveau de l’ambassade des États-Unis, le feu tricolore passe tranquillement à l’orange. Nous roulions tranquillement alors le conducteur se met à ralentir, puis s’arrête sans difficultés. Par contre, un autre conducteur, roulant à plus grande vitesse, n’eut d’autres options que de foncer, avant que le feu ne passe au rouge ; ce qui fut fait. C’était sans compter avec la cupidité des policiers togolais, qui ont pris la sale habitude de se poster, sinon de se cacher, à des dizaines de mètres après les feux tricolores.
L’un des agents de la « police routière », se met immédiatement en travers de la route, faisant signe au conducteur de s’arrêter, et de se garer sur le côté. Ce dernier, semble ne pas vouloir s’exécuter, accélérant même ! Le policier, dans un excès de zèle, faisant mine de s’écarter de l’engin qui fonçait sur lui, décoche un violent coup de pied sur le pneu avant de la moto. Déséquilibre, acrobatie, tentative de maîtrise de l’engin… mais, rien à faire. La moto heurte le terre-plein central, et les deux passagers se retrouvent à terre, carrément de l’autre côté de la route. Dieu merci, pas de circulation intense dans le sens inverse, la matinée.
Je pensais regarder un film hollywoodien, dans lequel un policier tente de calmer les ardeurs de Jason Statham. Non ! Cela se passait là, sous mes pauvres yeux. Les passagers réussissent à se relever, visiblement choqués par ce qui vient de leur arriver. Le conducteur, blessé au coude, abandonne la moto sur la route, se dirige vers le policier, comme pour lui demander des explications. Mais dès qu’il fut assez près, il lui asséne une puissante et retentissante gifle, qui manqua de le renverser. Le policier n’eut pas le temps de reprendre ses esprits. Il fut soulevé par les jambes, comme dans les luttes traditionnelles togolaises ou sénégalaises, puis plaqué contre l’asphalte. C’est là que le conducteur lui décoche un mignon coup de pied dans l’abdomen avant de se jeter sur lui pour le rouer de coups.
C’est à ce moment que les autres policiers, (08 en tout, à raison de 04 par sens), se ruent pour porter secours à leur confrère, visiblement en danger. C’est également à ce moment que le feu passe au vert, mais personne ne voulait rater le reste de la scène. Le conducteur est rapidement maitrisé, et conduit sous un arbre, à côté, tandis que le policier meurtri essayait de retrouver ses esprits. A voir comment il fut transporté par ses collègues, il devait être en syncope. La route enfin dégagée, l’un des policiers nous fait signe de circuler. Tout le monde fini par démarrer, avec des exclamations de félicitations à l’endroit du conducteur-boxeur, et des boutades moqueuses envers les policiers.
Arrêtons-nous un instant pour méditer cet acte.
Chers amis, la formation de juriste que j’ai reçue à l’Université ne me permet point d’accepter un tel acte. Non ! Rien, absolument rien ne peut justifier la violence physique exercée sur un policier, dans l’exercice de ses fonctions. Si ceux qui représentent la loi et qui sont chargés de la faire respecter sont agressés, passés à tabac, nous ne sommes plus une démocratie : Nous sommes une anarchie. OK.
Mais le togolais que je suis, le témoin des ignominies policières que je suis, ne peut que jubiler lorsqu’une excellente raclée est administrée à l’un de ses « corps habillés ». Je ne le dis pas de gaieté de cœur, mais chapeau à cet individu qui s’est battu « comme un homme », contre l’autorité illégale et illégitime. D’ailleurs, tous ceux qui ont assisté à la scène ont applaudi.
Au Togo, nos policiers se comportent de façon exécrable : ils sont d’abord mal éduqués, mal formés, et mal payés. Mal éduqués parce qu’avant de porter l’uniforme, le policier est un être humain, issu de la société. Et lorsqu’on est bien éduqué, on salue les conducteurs plus âgés que soi avec respect et révérence. Je ne demande pas au policier de se plier en deux, en face d’un conducteur du troisième âge ayant brûlé un feu ! Mais venez voir comment ces nouvelles recrues d’à peine 23 ans s’adressent aux gens, dans la circulation.
Ces policiers sont mal formés, car le bon sens exige que celui qui est chargé de réguler la circulation en connaisse les règles. Combien de policiers togolais ont-ils un permis de conduire ? Quelle dichotomie, qu’une personne ayant son permis de conduire, se fasse verbaliser par un policier n’ayant jamais tenu un volant de véhicule, n’ayant jamais appris le code la route ? Hehehe, autre chose: Entre nous, un policier bien formé ne peut être facilement soulevé et terrassé comme l’a été l’autre imbécile. Aucune technique de self-defense!
Ces policiers sont aussi et surtout mal payés. Pour un agent de la brigade motorisée, il est aberrant de ne pas percevoir plus de 80 milles francs par mois. Ne parlons même pas de ces petits policiers. Ils font tellement de la peine, eux ! Ils sont si misérables qu’avec 500 FCFA, tu peux conduire la voiture de ton père dans toute la capitale sans permis de conduire. Oui, seulement 500 FCFA, car celui qui te verbalise en premier, demandera aux autres policiers en service de te laisser passer. D’ailleurs, cela se comprends ! Ces policiers n’ont aucun diplôme (BEPC pour les plus instruits), et ensuite, la verbalisation coûte 5.000 FCFA. Un compromis a toujours été bénéfique pour les deux parties.
Chers lecteurs, je ne suis point entrain de jeter le discrédit sur la fonction de police routière loin de là. Je suis convaincu que c’est un métier noble, et un service incontournable. Seulement, que ceux qui l’exercent le fasse en toute intelligence, humilité, sérieux, et avec beaucoup d’égard. Sinon, on a beau représenter la Loi, exercer les fonctions régaliennes de l’Etat ; lorsqu’on se permet de poser des actes qui n’entrent pas du tout dans l’exercice de cette tâche, eh bien il vaut mieux prier ne jamais tomber sur plus fort que soi.
D’ailleurs, je retourne à mes entraînements de Yoga et de Karaté. Policier va prendre drah.
J’ai dit !
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